Les puces sont partout
Anjali Bastianpillai: Quel est l’impact de l’essor de l’intelligence artificielle (IA) sur le secteur des semi-conducteurs?
Chris Miller: La conséquence immédiate est un accroissement de la demande de puces d’IA qui profite à de nombreux acteurs du secteur, et plus particulièrement au concepteur et fabricant américain Nvidia. Mais alors que cette première vague d’investissements a concerné surtout les centres de données, il faut imaginer qu’à terme, les systèmes d’IA fonctionneront de manière décentralisée, sur nos smartphones, dans nos voitures et sur les différents appareils électroniques que nous emportons partout: ce sera l’ère de l’edge computing.
Anjali Bastianpillai: Quelle est l’innovation qui vous captive le plus en ce moment?
Chris Miller: Aujourd’hui, l’innovation se focalise surtout sur l’amélioration des performances des puces d’IA, qui a permis de perfectionner les systèmes au cours de la décennie écoulée. Ainsi, les fabricants de processeurs graphiques (ou GPU), comme Nvidia, et de mémoires à large bande passante (ou HBM), comme SK Hynix, fournissent aujourd’hui des puces infiniment plus puissantes qu’il y a une dizaine d’années. Les grands systèmes d’IA sont ainsi entraînés sur une quantité très supérieure de données, ce qui les rend bien plus efficaces que leurs prédécesseurs.
Dans un premier temps, l’essor de l’IA freinera la transition énergétique, car il faudra plus de combustibles fossiles pour faire tourner les nouveaux centres de données consacrés à l’IA. Malgré tout, les semi-conducteurs joueront un rôle moteur dans l’électrification de nos économies.
Anjali Bastianpillai: Quels sont les cas d’usage les plus intéressants?
Chris Miller: Je pense que le thème de l’IA continuera de dominer un certain temps. A plus long terme, je suis fasciné par les interconnexions prometteuses entre les semi-conducteurs, les biotechnologies et les dispositifs médicaux. Plusieurs jeunes pousses sont par exemple en train de développer des puces capables de détecter certains marqueurs biologiques.
Anjali Bastianpillai: Comment la concurrence entre les Etats-Unis et la Chine affectera-t-elle la filière? Peut-elle être un vecteur d’innovation?
Chris Miller: La rivalité sino-américaine a un effet indésirable, celui d’engendrer la duplication des chaînes d’approvisionnement, ce qui coûte cher aux acteurs du secteur et leur fait perdre en efficacité. Mais elle a aussi l’avantage de pousser les Etats-Unis et d’autres pays à redoubler leurs efforts de recherche-développement, une stratégie qui – si elle est correctement menée – devrait donner un coup d’accélérateur à l’innovation.
Anjali Bastianpillai: A ce jour, le secteur n’a pas de comptes à rendre sur son impact environnemental. Comment faire pour y remédier?
Chris Miller: En dépit des nombreux produits chimiques nécessaires à la fabrication de semi-conducteurs, la filière a déjà fait d’importants progrès pour atténuer son impact sur l’environnement. La prochaine grande étape sera d’innover pour remplacer une catégorie de produits chimiques appelée PFAS, qui met énormément de temps à se dégrader.
Comment sont fabriqués les semi-conducteurs?
Le processus étape par étape de la fabrication des semi-conducteurs
Source: ASML, Pictet Asset Management 2025
Anjali Bastianpillai: Malgré tout, les semi-conducteurs ont-ils un rôle à jouer dans la transition énergétique?
Chris Miller: Ils en sont même un facteur essentiel, mais le sujet est complexe. Comme je l’ai dit, l’IA devrait au départ faire obstacle à la transition verte, puisque les centres de données sont très énergivores. Mais à terme, elle pourrait contribuer à l’électrification de nos économies. Par exemple, les véhicules électriques de nouvelle génération sont truffés de semi-conducteurs, dont la plupart servent à optimiser l’utilisation de la batterie et à minimiser la consommation d’électricité.
Anjali Bastianpillai: Depuis une soixantaine d’années, on a pu observer que le nombre de transistors présents sur un circuit intégré doublait tous les deux ans. C’est la fameuse loi de Moore, qui implique ainsi que des puces toujours plus petites peuvent générer des performances identiques, voire supérieures. Or, le processus de fabrication est passé, il y a quelques mois, de 7 nm (nanomètres) à 5 nm. Est-ce qu’on parle là de leur taille?
La rivalité sino-américaine a un effet indésirable, celui d’engendrer la duplication des chaînes d’approvisionnement, ce qui coûte cher aux acteurs du secteur et leur fait perdre en efficacité.
Chris Miller: Les chiffres en nanomètres ont principalement une vocation marketing. Avant, on comparait les puces d’après leur taille, mais aujourd’hui, elles sont en 3D, ce qui multiplie les dimensions à prendre en compte. Plus simplement, il faut savoir que la puissance de calcul augmente considérablement entre chaque génération (par exemple entre les puces 7 nm et les puces 5 nm).
Anjali Bastianpillai: Faut-il s’attendre à une augmentation des investissements visant à développer les capacités de production, pour répondre à la demande accrue de semi-conducteurs?
Chris Miller: Les dépenses d’investissement ont déjà fortement augmenté, mais je pense que les fabricants sont pour l’instant réticents à se développer encore davantage. Ils savent que leur activité est cyclique et attendent d’avoir plus de visibilité sur l’évolution de la demande de centres de données consacrés à l’IA. Reste à savoir si les géants technologiques continueront de dépenser des dizaines de milliards chaque année dans les infrastructures d’IA, ou s’ils marqueront une pause jusqu’à ce que des applications plus rentables voient le jour.
Articles tirés du rapport Mégatendances 2025
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