Sébastien Renaud - Le cycliste gravel d’élite qui slalome entre les épreuves
Une semaine plus tôt, Sébastien s’était rendu à Gérone pour participer à une course de vélo gravel, la Traka Adventure. Avec ses 560 kilomètres et ses plus de 10 000 mètres de dénivelé, il s’agit d'une des plus grandes courses de gravel d’Europe. «Le vélo gravel est un mélange entre le vélo de route et le vélo de montagne, ce qui permet de s’aventurer sur des chemins plus escarpés et d’accéder à des endroits perdus en pleine nature, tout seul au milieu de la montagne», explique-t-il.
Pendant cette course en Espagne, alors qu’il a déjà parcouru plus de 400 kilomètres, Sébastien découvre que le parcours est traversé par une rivière. Manque de chance, il n’a pas pris de vêtements étanches avec lui. Il s’élance quand même, et traverse la rivière, de l’eau jusqu’à la taille. Sébastien est trempé, et le froid s'empare rapidement de lui. Son instinct de survie le pousse à se réfugier dans un bancomat pour se réchauffer. «Je me suis réveillé en sursaut, sans me souvenir de m'être endormi. Mon navigateur, qui m’indiquait où aller pour suivre le parcours de la course, n’avait plus de batterie. S’il n’y avait eu que l’hypothermie, je serais reparti. Mais sans capteur GPS, je n’ai malheureusement pas eu d’autre choix que d’abandonner.»
Le fidèle vélo de Sébastien, gravé des noms de sa partenaire et de ses enfants, l'accompagne dans toutes ses aventures, lui rappelant l'essentiel.
Sébastien a toujours été un grand sportif. Pendant son adolescence, il était passionné par la course à pied, et faisait partie de l’équipe de France Espoirs (U-23). Mais lorsqu’il a commencé ses études, il est devenu trop difficile de concilier révisions et entraînements de haut niveau. Du jour au lendemain, il a tout arrêté et n’a plus jamais mis des baskets aux pieds. «Je ne voulais pas reprendre si c’était pour être mauvais, c’était impensable pour moi.»
Dix ans plus tard, à la naissance de son fils en 2013, sa compagne, voulant l’encourager à reprendre le sport, lui a montré une annonce pour un vélo d’occasion. Sébastien s’est laissé tenter et, très vite, les entraînements quotidiens ont pris une place très importante dans sa vie, comblant ainsi le vide laissé par la course à pied. A mesure qu'il s'entraînait, Sébastien a progressé, réalisant des courses de 100 à 150 kilomètres. Mais en octobre 2021, sa passion a pris un nouveau tournant.
Début 2020, alors que la pandémie battait son plein, Sébastien a appris que sa compagne était atteinte d’un cancer du sein. Les semaines de chimiothérapie à l'hôpital se sont alors enchainées et, en raison des restriction liées au covid, Sébastien et ses enfants ne pouvaient pas lui rendre visite. En octobre 2020, alors qu’elle devait subir une double mastectomie ainsi qu’une ablation des ovaires, sa compagne a contracté le covid. Face à l'urgence de l'intervention, les médecins ont décidé de procéder à l'opération malgré les risques que cela représentait pour le personnel médical et la sécurité en salle d'opération.
J’ai adoré ce défi, et j’ai réalisé que c’était vraiment ce sentiment de dépassement de soi qui me plaisait dans ce sport.
Un an plus tard, alors que sa compagne s’était remise de cette épreuve, Sébastien a ressenti le besoin de faire quelque chose de spécial pour témoigner de son admiration pour le courage de sa compagne face à ce combat, ainsi que de sa reconnaissance envers les médecins qui l’avaient sauvée. Il s’est donc lancé le défi de pédaler sur son home trainer pendant 24 heures sans s’arrêter pour lever des fonds pour l’association l’Aimant Rose, qui a pour but de promouvoir le dépistage précoce du cancer du sein. «Je n’avais jamais ressenti une telle motivation. La persévérance de ma compagne face à la maladie ainsi que le soutien de mes amis qui avaient participé à la levée de fonds m’ont porté pendant ce défi. Il était hors de question d’abandonner, je ne pouvais pas les décevoir.» Grâce à sa performance, il a levé près de CHF 4000. Cette nouvelle expérience d’endurance sur une longue période a été une révélation pour lui. «C’était la première fois que je réalisais une telle distance. J’ai adoré ce défi, et j’ai réalisé que c’était vraiment ce sentiment de dépassement de soi qui me plaisait dans ce sport.»
Sébastien Renaud est Head of Regulatory Change au sein de Risk & Control Functions PAM
Aujourd’hui, Sébastien participe à deux ou trois compétitions d’ultra endurance par an. Pour parcourir de telles distances, il est crucial de connaître le fonctionnement de son corps par cœur afin de savoir exactement comment il va réagir à l’effort. «Je lis énormément de livres et d’articles scientifiques sur le sport, le corps humain, ou encore la nutrition. C’est essentiel pour moi de tout comprendre pour maîtriser mon corps et mon vélo pendant la course, ça me passionne.»
Pour moi, la famille passe toujours en premier, suivie du travail, puis enfin c’est le vélo.
L’entraînement et la préparation sont également des éléments incontournables, et Sébastien explique que tout est une question d’équilibre et de priorités. «Pour moi, la famille passe toujours en premier, suivie du travail, puis enfin c’est le vélo.» Avant une course, Sébastien passe des heures à anticiper chaque détail du parcours. «Je repère les endroits où je pourrai m’approvisionner en eau, acheter à manger, les heures d’ouverture, les emplacements des toilettes publiques, etc.»
Mais malgré toute cette préparation, des détails peuvent lui échapper, et il a dû faire face à de nombreuses mésaventures. «J’ai la réputation de ne pas avoir de chance lors des courses, il y a toujours quelque chose qui ne se passe pas comme prévu. A tel point qu’avant une compétition, je me demande ce qui va m’arriver cette fois-ci», raconte-t-il en souriant. Toutes ces péripéties lui ont permis de développer une grande résilience et une patience à toute épreuve, qui lui servent autant dans le sport que dans la vie de tous les jours et le travail. «Ça me permet de prendre du recul, de rester positif, et de trouver des solutions dans toutes les situations.»
Mon rêve serait de participer à l’UNBOUND Gravel, aux Etats-Unis. Le parcours ne fait que 322 kilomètres, mais la course rassemble plus de 6ooo participants, ce qui en fait une des plus grandes courses de gravel au monde.
A peine rentré de sa mésaventure espagnole, Sébastien ne se laisse pas abattre et prépare déjà son prochain défi: Le Tour des Stations Ultimate 1000, qui aura lieu en juillet. Au départ d’Aigle dans le canton de Vaud, cette course de 1000 kilomètres s’étend sur deux jours et deux nuits, parcourant 13 cantons et traversant des cols légendaires comme le Flüela, l’Albula et le Klausen. Et son objectif ultime? «Mon rêve serait de participer à l’UNBOUND Gravel, aux Etats-Unis. Le parcours ne fait que 200 miles (322 kilomètres), mais la course rassemble plus de 6ooo participants, ce qui en fait une des plus grandes courses de gravel au monde.»
Lorsqu'il ne parcourt pas les montagnes à vélo, Sébastien Renaud est Head of Regulatory Change au sein de Risk & Control Functions PAM à Genève.